Art-thérapie pour les collèges et les lycées
Parce que nos enfants ont une vie à vivre.
Afin qu'ils deviennent des adultes épanouis et heureux
Il est indéniable que la crise sanitaire a engendré des bouleversements majeurs, et nos enfants en ont été les victimes collatérales. Il est crucial de reconnaître les changements profonds qu'ils ont dû affronter.
Les mesures sanitaires imposées pendant la pandémie, telles que la distanciation physique et le port du masque, ont considérablement altéré le quotidien des enfants et des adolescents. Ce passage de l'enfance à l'adolescence, déjà semé d'embûches, a été d'autant plus ardu. Les familles elles-mêmes ont été éprouvées par cette crise sans précédent, et elles ont dû s'adapter avec peine. Les conséquences se sont fait sentir à tous les niveaux, et l'épuisement parental s'est manifesté de manière alarmante. En France, en 2021, le nombre de cas de burn-out atteignait les 2 millions. En mars 2022, cette chiffre avait déjà grimpé à 2,5 millions !
Parmi ces victimes, nous trouvons aussi bien des parents que des enseignants...
Imaginez cette trinité : des enseignants vacillants, des parents vacillants et, en tant que dommages collatéraux, des enfants vacillants.
En tant qu'intervenant en art-thérapie dans un collège de Senlis, j'accompagne des groupes d'adolescents de 3e. Chaque groupe compte une quinzaine d'enfants, et dès le premier jour, je peux percevoir un profond mal-être chez ces jeunes : stress, angoisses, manque d'estime de soi et de confiance. Ils sont secoués par les multiples défis auxquels ils sont confrontés. Cette détresse se manifeste par un abattement, une accablance, une amertume, une tristesse, une dépression, un désespoir, une difficulté à faire face au deuil, de la douleur, de l'ennui, des pensées sombres, de la violence... Alors qu'ils devraient aspirer à conquérir le monde, à être amoureux, à se sentir puissants, à expérimenter, à être joyeux, à se sentir vivants...
"On ne peut se confier à personne", "ce n'est jamais le bon moment", "on les ennuie", "ils ne nous écoutent même plus", "on ne peut même plus parler", "tout le monde s'énerve à la maison en un instant", "fais-ci, fais pas ça", "as-tu fait tes devoirs ?", "ce n'est pas ce qu'on attendait de toi", "une heure de colle..."
Dans mes cours, nous nous motivons, identifions nos qualités et les mettons à profit. Nous réfléchissons à notre futur métier, menons des expériences créatives pour comprendre nos émotions et apprendre à les gérer. Nous nous exprimons librement, sans jugement.
L'art-thérapie est bien plus qu'une simple détente. C'est une pratique thérapeutique qui favorise l'expression de soi et la compréhension du monde. Un art-thérapeute est un psychologue utilisant l'art comme moyen d'expression.
Nous cultivons la sérénité dans mes cours, sans bruit imposé. Parfois, nous dansons, chantons et vivons l'instant présent.
L'art-thérapie nous aide à acquérir des valeurs essentielles telles que le pardon, le respect, l'écoute, la loyauté et la protection de l'environnement. Je souhaite ancrer ces valeurs chez nos jeunes pour qu'ils deviennent des adultes autonomes et responsables.
En pratiquant de manière active et en expérimentant, nous apprenons et retenons mieux.
Mon expérience et témoignages
Tout au long de l'année, j'ai exercé en tant qu'art-thérapeute auprès d'une vingtaine d'adolescents de troisième au sein du collège Anne-Marie Javouhey de Senlis. Dès le premier jour, j'ai pu comprendre la complexité de leurs besoins à travers un simple exercice, révélateur de bien des aspects.
Ma classe réunissait des jeunes soumis au stress de l'échec, de l'examen du brevet, souffrant d'un mal-être profond, dépourvus d'estime et de confiance en eux-mêmes (nous aurions pu qualifier cela de timidité), ainsi que des marginaux, des esprits affirmés, des révolutionnaires, des résistants, des incompris, des indépendants, des anxieux, des déprimés et des joyeux. Cette diversité foisonnante convergeait ici, autour de l'expression artistique.
Cependant, une déception nous attendait, car la salle de classe mise à ma disposition ne permettait pas la pratique de la peinture. Nous avons alors décidé de nous tourner vers l'origami et la création d'une boîte à bonheur. Ainsi, ils ont découvert que le bonheur était une quête complexe, mais que nos journées étaient ponctuées de petites et grandes joies, et que si nous y prêtions attention, nous pouvions nous immerger dans la félicité.
Nous avons utilisé le froissage du papier pour explorer la colère, puis l'avons déplié, observant les marques laissées, pour ensuite les réparer avec de magnifiques couleurs. Ce faisant, ils ont compris la valeur du pardon;
Nous avons même osé danser sur les tables, bravant ainsi nos peurs, qui se sont rapidement transformées en une immense joie. Je leur ai posé la question : "Où ressentez-vous les choses ?" Et ils ont répondu avec exaltation : "Dans le ventre, Madame ! J'ai chaud. J'ai envie de rire..." Ces instants resteront gravés dans leur mémoire pour toujours.
Un jeu de rôle a également été mis en place, impliquant la "Famille Content" qui s'est rapidement transformée dans leur imagination en une famille bienveillante, et la "Famille Pas Content" qui a instantanément endossé les habits des antagonistes. À la manière d'un jeu de sept familles, nous avons créé des personnages tels que les enfants, les parents, les grands-parents et les cousins (nous étions nombreux). Par la suite, nous avons joué : nous étions là pour célébrer le mariage de Mademoiselle Content avec Monsieur Pas Content... Vous connaissez l'expression "que ceux qui ne sont pas d'accord le disent maintenant ou se taisent à tout jamais"... Nous étions donc en plein cœur d'une dramathérapie.
Comme vous l'avez compris, notre travail a porté essentiellement sur les émotions...
Cependant, nous avions également pour mission de participer au spectacle de fin d'année. J'ai donc demandé à mes élèves : "Que souhaitez-vous accomplir ?" Les réponses fusèrent :
- "Moi, je serai un panda."
- "Nous ferons du slam."
- "Pourquoi ne pas repeindre le mur du collège ?" (J'ai soumis l'idée, mais la direction a refusé...)
- "Une performance serait géniale."
- "Exposons nos travaux..."
Nous avons finalement opté pour une performance de slam, dans un décor enchanteur agrémenté d'un panda. Nous avions entre les mains un projet réalisable, à notre portée, qui nous inspirait, car rien ne nous avait été imposé, avec une échéance réaliste et atteignable.
Nos motivations étaient inébranlables, et nous avons présenté notre performance jeudi dernier, devant les parents. Ce fut une expérience extraordinaire ! Chacun a endossé un rôle et a eu l'occasion de monter sur scène. Je n'ai rien imposé pour la distribution des rôles, et j'ai été agréablement surprise de constater que mes élèves "timides" du début d'année ont été les premiers à se lancer dans le slam, que les réfractaires ont écrit des textes poignants, que les perfectionnistes ont osé se libérer, que tous ont travaillé sur le décor, que tous ont écouté et respecté les consignes du régisseur, une jeune fille du groupe qui ne se mettait pas en avant. Quant à notre panda, qui n'a cessé de nous amuser, il nous a offert une performance extraordinaire.
En début d'année, je leur avais dit : "Visez la lune pour atteindre au moins une étoile" (merci Oscar Wilde), et ils m'ont propulsée jusqu'à Jupiter !!! Ce moment restera à jamais gravé dans nos mémoires.
À la fin de la représentation, mes élèves m'ont chaleureusement remerciée pour ma gentillesse et ma bienveillance, affirmant avoir vécu une année incroyable. Ce fut un cadeau magnifique !
Je peux vous dire que j'ai rarement vécu un moment aussi intense, empreint d'émotions. C'est pour ces instants précieux que je suis heureuse d'exercer en tant qu'art-thérapeute.
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